
Bien des ingrédients ont été nécessaires pour fabriquer le premier roman de l'histoire de la littérature. Tout d'abord, il fut un reflet de la vie romaine, en particulier celle de l'empereur Néron et de son entourage. L'auteur, Pétrone, étant l'autorité en termes de goût (arbiter elegantiae) représenta une grande variété de situations, qu'elles fussent érotiques, aventureuses, poétiques ou sociales. Puis, le style se devait d'être ad hoc ; une image formelle directe du contenu : la forme s'appropriant le fond en quelque sorte. De là le titre, Le Satyricon, mot provenant du monde culinaire. Satyra signifie en effet salade, mélange ou mixture en latin. Ce roman (inachevé) est une succession de passages narratifs, poétiques, descriptifs où les odes, les passages critiques et les essais se disputent l'espace de la diégèse de facon très inhabituelle et remarquable pour son époque. Deux esclaves, Encolpe et Ascylte, ainsi que leur mignon Giton, sont les personnages principaux : nous suivons leurs allées et venues picaresques. L'épisode le plus fameux de cette oeuvre licencieuse et scandaleuse en est le festin de Trimalcion, l'affranchi devenu riche qui organise un banquet somptueux, extravagant et excessif. Le livre est un festin de mots et de genres différents, à l'image de ce repas dont le maître se réclame des heros grecs (des scènes de L'Iliade sont représentées sur les murs de sa villa). Pétrone nous offre là un superbe échantillon de prose, un magnifique creuset de mots : un morceau de bravoure par excellence.

No comments:
Post a Comment